1- 2007-2012-2017. Après 6 mois de présence à l’Elysée, quel bilan comparatif peut on dresser des 3 présidents français; Nicolas Sarkozy, François Hollande, et Emmanuel Macron ? Quelles ont été, sur les différentes thématiques, les promesses de campagnes respectées, ou non, et les mesures les plus emblématiques de ces débuts de quinquennat ?
Les six premiers mois de Sarkozy ont été tonitruants sur le plan des mesures prises ou en cours d’adoption. « Tout ce que j’ai promis de réformer, je le réformerai! » assenait-il à ses débuts. Parmi les mesures symboliques, on se souvient des peines planchers pour les récidivistes, la défiscalisation des heures supplémentaires, l’obligation d’apprentissage du Français et des valeurs de la République avant l’optention d’un visa de séjour, l’allègement de l’impôt sur l’héritage, considéré comme sa mesure la plus populaire, la mise en place du service minimum dans les transports, pour mettre fin aux mouvements de grèves qui paralysent le pays… Les débuts de François Hollande ont été plus progressifs. Les grandes mesures emblématiques comme le « mariage pour tous » sont venues plus tard. De fait, les premiers mois de ce quinquennat ont été marqués par l’antisarkozysme et il fallait faire tout le contraire de son prédécesseur y compris en ne manifestant pas de suractivisme. Le début de mandat de M. Macron se situerait dans une position proche du mandat Sarkozy. Il tient le même discours sur sa volonté de mettre en oeuvre les réformes promises, et plusieurs ont été faites: sur la moralisation de la vie publique, sur le code du travail avec les ordonnances, sur la fiscalité avec la transformation de l’ISF en impôt sur la fortune immoblière et la suppression progressive de la taxe d’habitation, sur la sortie de l’état d’urgence et la lutte contre le terrorisme. Ces réformes ont-elle la même ampleur et portée que celles des six premiers mois Sarkozy? C’est encore difficile à dire aujourd’hui de manière objective…
2- Selon les données IFOP-JDD, les mois de décembre 2007-2012-2017 se traduisaient par des niveaux popularité respectifs de 52%, 37%, et 52% au près des Français, soit un niveau comparable entre Nicolas Sarkozy et Emmanuel Macron. Quels sont les comparaisons à faire entre le début de mandat des deux hommes ?
Une différence sensible sépare, d’une part les six premiers mois des mandats Sarkozy/Macron, et d’autre part, ceux du mandat Hollande. Les deux premiers se situent dans une période de croissance internationale et de baisse relative du chômage tandis que Hollande arrive à l’Elysée dans la tourmente de la crise économique. Peut-être que la différence de popularité s’explique, au moins en partie, par ces écarts dans la situation économique. Concernant les débuts de mandat des deux hommes, Sarkozy et Macron, ils ont des ressemblances et des différences. Tous deux sont des rebelles dans leur camp. Sarkozy veut la « rupture » vis-à-vis de l’ère Chirac dont il fut ministre et Macron n’a de cesse que de se démarquer de Hollande, dont il fut aussi ministre. Ils ont l’ambition de casser les clivages politiques. Sarkozy pratique « l’ouverture » en appelant dans son gouvernement un maximum de personnalités de « gauche ». Macron va plus loin: venu d’un gouvernement socialiste, il nomme un Premier ministre « de droite ». Autre ressemblance frappante: l’utra personnalisation du pouvoir, la mise en scène presque caricaturale de leur personnage qui écrase tout le reste, avec la bénédiction des médias qui raffolent de la « politique spectacle ». Le climat est en revanche extrêmement différent: chaotique sous l’ère Sarkozy, qui commence avec de violentes polémique sur le Fouquet’s, le « discours de Dakar », les tests ADN; au contraire radieux et bienveillant, à l’exception de quelques rares accrocs, autour de l’image du plus jeune président de France, auréolée d’optimisme, d’harmonie et de jeunesse.
3- Contrairement à ses deux prédécesseurs qui ont pu cliver le pays entre les deux camps traditionnels, on peut observer une mutation du soutien à Emmanuel Macron qui s’est déplacé à droite de l’échiquier. A quelles conditions Emmanuel Macron peut-il espérer rester, au contraire de Nicolas Sarkozy et de François Hollande, au delà de ce seuil de 50% ? Au regard du mouvement politique annoncé, une telle hypothèse est -elle crédible ?
Deux facteurs entrent en jeu. Le premier, c’est la situation économique internationale. Tant qu’elle continue à s’améliorer et bénéficie à la France, même faiblement, même avec un décalage de plusieurs années en raison des lourdeurs structurelles de l’économie française, la cote de M. Macron pourra sans doute se maintenir à un niveau élevé. Toutefois, il est peu probable que l’amélioration perdure pendant cinq ans. Le chômage français reste à un niveau considérable de 3,5 à 5,5 millions de personnes. La tendance légère à l’amélioration favorise une remontée de la cote présidentielle. Mais ce phénomène est précaire et rien ne permet de penser que les facteurs profonds du décrochage français sur l’économie, l’emploi, l’industrialisation, sont en voie d’être résorbés, notamment le niveau des prélèvements obligatoires qui reste astronomique (47% du PIB) et celui de la dette publique (100% du PIB) sans que rien ne soit en voie de changer à cet égard. Si une nouvelle crise internationale devait survenir dans les années à venir et le chômage repartir à la hausse, M Macron sera accusé de ne pas avoir fait les réformes nécessaires pendant la période favorable et une vague d’impopularité lui reviendra en boomerang. Or, dans les cinq ans à venir, la probabilité d’une crise économique est assez forte.
Le second facteur, c’est celui de la communication, de l’image personnelle. Pour l’instant, sur le plan de l’image, M. Macron surpasse à la fois Sarkozy et Hollande. Dans l’ensemble, il bénéficie dans les médias radios et télévisions, une partie de la presse, d’une aura qui n’a guère de précédent, liée à sa jeunesse, à la modernité des apparences et du discours en particulier le ni droite ni gauche. Mais cette image est d’autant plus fragile qu’elle est omniprésente. L’usure du pouvoir liée à la surmédiatisation est un risque. En outre, nul n’est à l’abri d’un désastre médiatique, à l’image de l’affaire Cahuzac pour M. Hollande. La population peut finir par se lasser, malgré le message médiatique positif et valorisant. L’image médiatique compte immensément dans le monde mderne. Mais le réel peut resurgir à tout moment. L’opinion publique, un jour où l’autre, peut être amenée à demander des comptes au président, omniprésent, supposé omnipotent donc omniresponsable, en matière d’emploi, mais aussi de sécurité, de lutte contre le terrorisme et le communautarisme, de maîtrise de l’immigration, de pouvoir d’achat, de niveau scolaire, etc. Pis: le monde médiatique peut aussi retourner sa veste, par lassitude ou par opportunisme et lâcher soudain son protégé. Bref, par delà l’effet de mode, par-delà les jubilations et éblouissements de l’immédiat, la probabilité d’une popularité durable sur cinq ans paraît assez faible.