Nulle part ailleurs qu’en France un spectacle comme celui de l’arrivée solennelle de M. Macron devant la pyramide du Louvre puis son discours n’est concevable: ni en Angleterre, ni en Allemagne, ni en Italie, ni en Espagne… Dans le Figaro d’hier, un ancien ministre de M. Sarkozy donnait une longue interview intitulée: « La France va être amoureuse d’Emmanuel Macron » (sic). Dans les journaux, la radio, la télévision, l’émerveillement est général. Ce matin, sur radio bfm, un autre ancien ministre, de Chirac cette fois-ci, le compare à « Bonaparte ». Cette euphorie serait compréhensible si M. Macron pouvait se targuer d’une décision, d’un choix, d’un acte décisif pour l’avenir du pays, d’un seul geste d’un homme d’Etat confronté à la réalité. Aujourd’hui, tel n’est pas le cas. Son succès repose sur une élection étrange, porté à bout de bras par les médias et des circonstances invraisemblables. Il n’existe aucun autre pays du monde occidental où un tel culte de la personnalité est concevable, sans fondement dans le monde des réalités, uniquement façonné dans celui des chimères. Tel est le pire signe de la France malade. Un pays ravagé par le chômage, ensanglanté par le terrorisme, menacé par le repli identitaire sur toutes ses formes, le communautarisme, une vertigineuse crise de confiance envers la politique, fuit dans les limbes de l’imagination et se projette dans le culte de la personnalité, le rêve, l’émerveillement, s’est trouvé un sauveur providentiel. Cet hallucination collective, apparition magique, est la contrepartie d’un gigantesque malaise dans les profondeurs du pays, comme une foule malade qui d’identifie au héros dont elle a besoin. Nous sommes en plein dans le délire présidentialiste français qui s’aggrave de jour en jour. Plus le pays sombre dans la déliquescence, et plus il a besoin d’une image providentielle, au dessus de lui, à laquelle se confondre. Si je me trompe, si nous sommes bel et bien à l’aube d’une ère nouvelle incarné par cet homme neuf, tant mieux! Je serai heureux de m’être trompé! Et ferai amende honorable. Rendez-vous le 1er janvier 2018. Mais si j’ai raison, si je ne me trompe pas, alors, l’atterrissage, le retour à la terre ferme s’annonce d’une violence inouïe, pour lui mais aussi pour nous tous.
Maxime TANDONNET