L’A330-200 est le plus petit membre de la famille gros porteur long courrier A330/A340 d’Airbus. C’est aussi celui qui rencontre le plus de succès auprès des compagnies grâce entre autre à son imposant rayon d’action.
L’A330-200 est pour le moment l’unique dérivé de l’A330-300. Il fut lancé en Novembre 1995 sur un simple constat : les compagnies aériennes demandent toujours plus d’autonomie pour des coûts de maintenance toujours plus faible. Dans ce contexte, l’intérêt pour les biréacteurs par rapport aux quadriréacteurs ou aux triréacteurs s’en trouve augmenté: l’achat, la maitenance et le remplacement de deux moteurs revenant évidemment moins cher que pour trois ou quatre moteurs. Avec l’arrivée de biréacteurs gros porteurs (Airbus A300 et Boeing 767) faisant preuve d’une fiabilité exceptionnelle et équipés de moteurs possédant une grande réserve de puissance en cas de panne, des vols ETOPS furent autorisés à partir de 1985. Ces vols permettent à des biréacteurs de s’affranchir partiellement de la règle des « 90 minutes » qui leur interdit de s’éloigner à plus de 90 minutes de vol avec un moteur en panne d’un aérodrome de déroutement.
Face à la montée en puissance de ces vols ETOPS, Boeing et Airbus réagirent différemment. Le constructeur américain disposait déjà de son biréacteur moyen courrier 767 qu’il adapta rapidement aux vols ETOPS longs courriers avec les versions ER (pour Extenced Range). Mais c’est avec le 777 que le principe d’appareil ETOPS prit toute sa dimension. Doté de deux réacteurs GE90 surpuissants, le « triple 7 » s’impose comme un pur avion transpacifique. Airbus de son côté adoptait une stratégie plus « timide » : au lieu de se lancer dans le développement d’un unique biréacteur, l’avionneur européen s’appuya sur une solution originale : développer un biréacteur (A330) et un quadriréacteur (A340) à partir de la même cellule. Selon lui, les bimoteurs gros porteurs ETOPS perdent leurs avantages sur les quadri au delà de 11.000 km d’autonomie. Un bimoteur conçu pour des étapes de 12.500 km dans la catégorie des 300 passagers visée par l’A340 se verrait ainsi pénalisé par un effet « boule de neige » entre divers facteurs : poids de la machine, puissance des moteurs, charge en carburant.
Cette analyse pertinente permit à Airbus de s’imposer sur le marché des longs courriers. Toutefois, face au Boeing 777 et 767 les ventes d’A330/A340 se révélèrent un peu décevante et commencèrent à perdre de la vitesse entre 1992 et 1995. Les cadences de production des A330 et A340 restèrent longtemps aux environs de quatre appareils par mois alors que les prévisions au moment du lancement tablaient sur sept avions par mois. Airbus avait semble-t-il sous estimé le potentiel des vols ETOPS et c’est pour ne pas se laisser doubler par son concurrent que le consortium décida de lancer l’A330-200, version à capacité réduite et autonomie accrue de l’A330-300. Cet avion, croisement entre l’A330-300, l’A340-300E et l’A340-200, devait doper les ventes des gros fuselages européens et affronter directement le Boeing 767 sur le terrain des vols ETOPS.
Comme à son habitude, Airbus appliqua sur le 330-200 le principe de communité qui fit et fait toujours son succès. En effet, l’A330 et l’A340 sont pratiquement identiques jusque dans les moindres détails (les seuls différences étant de légères modifications de l’aile et du système de carburant). Cette communité réduit les coûts de conception et de production mais offre aussi aux compagnies aériennes le moyen de faire de sérieuses économies en diminuant le temps de formation des pilotes et du personnel de maintenance. Des économies peuvent aussi être réalisées en rationnalisant les stocks de rechange et d’outillage. Enfin, les transporteurs peuvent profiter d’une flexibilité exemplaire, les équipages pouvant posséder une qualification multiple ou Cross Crew Qualification. Cette flexibilité se retrouve aussi au niveau des commandes. Bien qu’elle soit ici assez limitée en raison du nombre différents de moteurs, des changements de commandes peuvent être facilement effectués: ainsi, en 2000 une commande de 2 A330 a été modifié en A340.
Toutefois, la communité ne s’arrête pas là. Non seulement les A330/A340 sont pratiquement identiques entre eux mais ils présentent de nombreux points communs avec le reste de la gamme Airbus (la famille A320 et le futur très gros porteur A380). Ainsi le cockpit entièrement numérisé a été « décalqué » sur celui de l’A320. On y retrouve le mini manche latéral caractéristique des Airbus, mais aussi les six écrans couleurs intégrés EFIS, ainsi que la disposition des autres instruments. Le temps de formation des pilotes qui ont déjà une expérience sur un avion de la famille A320 s’en trouve alors réduit à 8 jours soit une réduction pouvant atteindre une vingtaine de jours sur une formation « normale » : un argument de plus lors de négociations de contrats.
Le fuselage de l’A330-200 reprend le diamètre de son aîné A300. En effet, ses dimensions généreuses (5,64 mètres) permettent un plus grand confort aux passagers mais c’est surtout l’emport possible de deux conteneurs de type LD3 de front qui rend ce fuselage populaire auprès des compagnies. Par rapport à l’A330-300, il a été réduit de dix cadres ramenant sa longueur à 59 mètres. L’empennage horizontal et vertical à par contre dû être agrandi pour compenser la diminution de longueur du fuselage augmentant la hauteur de l’avion de plus d’un mètre, pour atteindre 17,9m. La voilure conserve les 60,3 mètres d’envergure initiaux et la surface alaire de 363,1 m2. L’A330-200 reprend également les ailes renforcées du quadriréacteur à masse accrue A340-300E ainsi que son reservoir central. Cet échange d’organes a permi de diminuer considérablement les coûts du développement. Ces modifications ont d’ailleurs été adoptées sur le 330-300 afin d’offrir une version à masse accrue encore plus attrayante. En configuration trois classes l’A330-200 peut emporter 253 personnes (12 en première, 36 en affaire et 205 en économique). En deux classes, la capacité peut être portée à 293 passagers.
Au niveau de la motorisation, l’A330-200 reprend exactement les mêmes moteurs dans les mêmes versions que celles proposées sur le -300, c’est à dire les CF6 de General Electric avec les CF6-80E1A2/A3/A4, les Pratt & whitney PW4000 avec les PW4164 et PW4173 ainsi que les Rolls-Royce Trent 768 et 772. Les poussées de ces moteurs évoluent entre 28,5 tonnes et 32,4 tonnes. La masse maximale au décollage est de 230 tonnes ce qui lui permet de franchir des distances de 11.850km mais il est aussi proposé avec une masse de 217t et une autonomie réduite à 8890km. Les performances générales de l’avion sont identiques à celles du 330-300 et d’une manière générale meilleures que celles du Boeing 767. Sa vitesse de croisière est de 860km/h et sa vitesse maximale 880 km/h.
Le début commercial de l’appareil fut excellent. Les ventes d’A330-200 se révélèrent excellentes. La première commande fut annoncé par le loueur géant américain ILFC dès le mois de mars 1996. Lors du vol inaugural le 13 août 1997, Airbus disposait d’un carnet fort de 85 intentions d’achat dont 49 fermes provenant de douze clients différents parmis lesquels Korean Air, ILFC, Sabena, Swissair, Austrian, Sabena et Emirates. Les différentes certifications de l’appareil furent achevées le 31 mars 1998 pour la version équipé de moteur General Electric. Les certifications avec les PW4000 furent obtenues en mai 98. Le premier appareil, loué par ILFC, entra en service dans la compagnie Canada 3000.
A côté de l’A330-200 d’autres versions dérivées de l’A330-300 furent étudiées. Parmis celle-ci, une version rallongée baptisée A330-400 fit un peu parler d’elle avant de retomber dans l’oubli. Plus récemment, une version raccourcie de 19 cadres d’abord nommé A330M19, puis A330-100 et enfin A330-500 fut envisagée pour remplacer le vieillissant A300-600R mais elle fut rapidement abandonnée à cause du peu d’intérêt des compagnies : seul Singapore Airlines s’était manifesté.
L’agrandissement de la famille A330 passe plutôt par des versions spécialisées de l’A330-200. Ainsi, Airbus a lancé une version cargo baptisée A330-200F. Initialement prévue en juin 2001 lors du Salon de Bourget cette annonce a été différée à cause du retard prit par les études, retard aujourd’hui comblé. Cet avion compte s’attaquer directement au Boeing 767-300F et le match semble tourner à la faveur de l’Airbus qui peut emporter 63 tonnes de fret sur 7800 km contre 56 t sur 6000 km pour le 767 précipitant le risque de fermeture de cette chaîne d’assemblage de Boeing (avenir actuellement suspendu à la décision du Pentagone sur les ravitailleurs en vol). De plus, selon Airbus l’A330-200F est complémentaire de l’A300-600F. En effet, le 300-600F est destiné aux lignes régionales tandis que le 330-200F a plutôt une vocation de très long-courrier. Il permet ainsi, l’exploitation de lignes qui ne peuvent être actuellement desservies que par des 747 en surcapacité pour des vols quotidiens. Le premier client visé par Airbus est le géant américain du fret express UPS qui serait prêt à convertir une partie des 50 options d’A300-600F qu’il détient. L’autre géant du fret express FedEx qui dispose déjà de 80 A300-600F et A310F attire aussi l’attention des commerciaux d’Airbus. Les intégrateurs ne sont toutefois pas les seuls clients potentiels de l’A330-200F : en effet, un certain nombres de compagnies qui sont des acteurs majeurs sur le marché du fret exploite déjà des A330-200/300. C’est notamment le cas d’Air France, de Korean Air, d’Eva Air, de Cathay Pacific, et de Northwest Airlines, mais aussi des ambitieux Emirates et de Qatar Airways déjà clients de l’A380 dans sa version fret. La communité est aussi importante avec le reste de la gamme Airbus (surtout pour la qualification des équipages) comme le montre l’exemple de Lan Chile un des clients potentiels qui dispose de 7 A340-300 et 25 A320 en commande. L’avenir de l’A330-200F s’annonce donc radieux d’autant plus que les prévisions tablent sur un marché de 290 avions d’ici à 2019.
L’A330-200 semble aussi promis à une belle carrière militaire. Bien qu’aujourd’hui aucune version militaire de cet appareil n’existe, EADS compte bien imposer son A330-200 sur le marché des ravitailleurs en vol. Le Royaume-Uni a déjà signé un contrat avec AirTanker dirigé par Thales (ex Thomson-CSF) pour la fourniture d’une trentaine d’appareils . Une proposition basée sur une cellule d’A330-200 pour la fourniture d’un service de ravitaillement en vol. Ce projet novateur (qui revient en fait à sous traiter le ravitaillement en vol à une société privée) servira probablement de modèle aux différentes forces aériennes européennes en manque chronique de ravitailleurs ; d’où l’importance de cette compétition. AirTanker qui regroupe EADS pour la cellule et l’intégration, Rolls-Royce pour la motorisation et la maintenance, FRA Cobham pour le système de carburant et la conversion, Thales pour l’avionique et l’entrainement et Brown & Root pour le soutien des appareils a pour la première fois battu le 767 du consortium Tanker & Transport comprenant BAE Systems, Boeing, Serco et Spectrum. Quand à lui, le marché américain initialement réservé au 767 de Boeing risque de basculer suite à la désormais célèbre affaire des ravitailleurs.Il est vrai que le 330-200 peut emporter 112 t de carburant, 60 t de charge utile pour une distance franchissable de 7200 km alors que le 767-300 emporte 90 t de carburant, 61 t de charge utile pour une distance franchissable de 6000 km.
Depuis maintenant quelques années, Airbus fait tourner la chaîne des A330/340 à un régime supérieur qu’initialement prévu et parmi les 830 commandes de la famille 330/340, 265 sont des A330-200 et 166 ont été livrés.