Réflexions sur l’avenir politique

Le site Atlantico a bien voulu m’interroger sur l’avenir de la droite républicaine, dans la perspective d’une possible alternance à l’horizon (lointain) de 2022. Mon sentiment, sur le futur politique du pays, extrêmement trouble et incertain, tient en trois impressions:

  1. La personnalisation du pouvoir atteint un niveau sans précédent dans l’histoire moderne, ferment d’une situation explosive. Toute vie publique se ramène aujourd’hui à l’image médiatisée d’un homme, une mise en scène quotidienne autour de lui. Cette personnalisation se fonde, aux yeux de la bourgeoisie influente, sur le mythe d’une « transformation » qui n’existe pas.  Bien au contraire, l’affaiblissement de l’efficacité et de l’autorité de l’Etat se traduit, en contrepartie, par la fuite dans l’émotionnel et la divinisation d’un personnage. Responsable du bonheur collectif, ce dernier devient inévitablement le réceptacle des déceptions et des souffrances –  incarnation des élites détestées – c’est-à-dire, le bouc émissaire national. Le vertige de l’impopularité voire la haine viscérale, sont la contrepartie inévitable de la personnalisation à outrance. 2022 a toutes les chances de cristalliser un immense sentiment de rejet. Dans les quatre ans à venir, une crise économique risque d’interrompre l’excellent cycle de la croissance mondiale, dissipant le fragile voile d’optimisme qui enveloppe la France « d’en haut ». La colère populaire, refoulée pendant des années, trouvera à s’exprimer dans un vote au goût de la vengeance, au goût de sang, au goût de 21 janvier 1793.
  2. Qui sera là pour la recueillir?  Sans doute pas la droite dite « nationale »: le lepénisme, profondément ancré dans la conscience collective comme un mal absolu, continuera d’exercer son rôle formidable de repoussoir. En revanche, dans un climat de plus en plus tendu et violent, poussant à la radicalisation et aux extrêmes, une voie pourrait bien se rouvrir en faveur de la gauche radicale. L’opinion est versatile, soumise aux émotions du moment. Nous n’y sommes pas passés si loin en 2017: déjà, une alliance Mélenchon/Hamon eût peut-être chamboulé la donne. Le modèle politique français permet à une infime minorité de rafler la mise intégrale avec 22% des votes au premier tour des présidentielles (soit 16% du corps électoral), sans parti politique, sans programme, sur le seul climat de rejet. Suivant une pure logique linaire, rien ne permet d’exclure le retour d’une gauche radicale unifiée, même très minoritaire dans le pays,  en position de récupérer la colère populaire, sur un mouvement d’humeur, en 2022.
  3. Aujourd’hui, l’espoir d’éviter une telle tragédie qui signerait la ruine de l’économie et de la société françaises repose entre les mains de l’opposition républicaine. La tâche est compliquée: elle aura toujours le vent médiatique et judiciaire acharné contre elle. Mon sentiment est qu’elle ne peut gagner que par un rejet catégorique du modèle En Marche. Elle n’empêchera le désastre en 2022 qu’en réinventant en profondeur la nature même de la vie politique française. Elle doit rompre avec la personnalisation outrancière du pouvoir – suscitant une allergie croissante des français et donnant prise à tous les coups tordus -, en finir avec la logique suicidaire de la guerre des chefs et le venin de la névrose élyséenne. Il lui faut en revanche remettre au premier plan de la politique le débat d’idées, le projet de société, la volonté générale, l’engagement collectif d’un groupe d’hommes et de femmes, unis et déterminés, non par la vanité narcissique, mais par le sens du bien commun et de la vérité. C’est à ce prix qu’elle peut éveiller un vent d’espérance dans le pays. Mais sont-ils en état psychologique, intellectuel, d’entendre et de comprendre ce message dans les deux ans qui viennent? C’est bien ce que j’ignore…

Maxime TANDONNET

 

 

 

 

 

 

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Author: Redaction