LR: « Pour que la France reste la France »

ENTRETIEN AVEC LE SITE ATLANTICO

1 Dans un sondage IFOP du 18 avril, Laurent Wauquiez se positionnait timidement à 8%. Et alors que les divergences internes se multiplient, le tract polémique « Pour que la France reste la France » a relancé les accusations de droitisation du parti. Si les détracteurs évoquent une connotation proche du FN,  certains rappellent que cette formule a déjà été utilisée par le passé. François Mitterrand, Nicolas Sarkozy et même Emmanuel Macron ont pu faire usage. Comment analysez-vous la polémique autour de ce tract ? Peut-on y voir une certaine dérive de la droite d’aujourd’hui ?

Il y a clairement une idéologie dominante post nationale qui n’est pas favorable à la nation et tout ce qui s’y rattache, un Etat, des frontières, une solidarité. La France est considérée comme un cadre dépassé, ringard, passéiste. Pour les élites dirigeantes, l’avenir se joue au niveau de l’Europe et de la planète, mais le cadre national est lui-même dépassé. D’ailleurs, il est incompatible avec un principe central de la modernité, l’individu roi, sans frontière, sans racine, sans communauté de rattachement. L’idée nationale était jadis de gauche. Elle a été délaissée depuis plusieurs décennies par les partis de gouvernement et les hommes politiques, qui l’ont abandonnée aux formations anti-systèmes. Il faut donc voir dans cette réaction au tract polémique la force du conformisme dans les milieux influents ou dirigeants, l’impératif de penser comme tout le monde, éviter d’être populiste, l’infâmie suprême, de paraître moderne, et pour cela mépriser une idée en voie de diabolisation, celle de nation. Mais cette vision idéologique est l’affaire des élites influentes ou dirigeantes. Elle ne concerne pas la majorité silencieuse qui reste attachée à la nation comme le montre le sondage CEVIPOF sur la confiance (2016) : 79% des Français sont fiers d’être Français (contre 19%).

2 « Dans l’entourage de Laurent Wauquiez, « on cherche encore ce qui est choquant. » » Peut-on lire dans le JDD du 03 juin. Pensez-vous que cette formule aurait moins choqué quelques années auparavant (dans la bouche de Nicolas Sarkozy par exemple). Qu’est-ce qui a changé ?

Il faut aussi prendre en compte le contexte politique. A l’intérieur du camp Les Républicains, les guerres des chefs continuent à faire rage en vue de la prochaine élection présidentielle. Derrière la polémique interne on retrouve la chasse à l’homme, la volonté de faire chuter Wauquiez, en tout cas d’abîmer son image. Et puis plus généralement, on sent bien ce qui va se passer dans les années à venir. Il y aura une collusion des élites dirigantes ou influentes, dans leur majorité, pour s’acharner sur LR et éviter sa renaissance. Le rêve des milieux dirigeants ou influents: limiter la vie politique à un affrontement entre l’actuel président et les partis anti-systèmes de droite comme de gauche. Quatre ans à l’avance, ils pensent, à tort, assurer ainsi à coup sûr l’élection de leur champion en 2022 ce qui est un calcul hasardeux… Dès lors, nous sommes aujourd’hui dans la logique d’une chasse permanente contre LR et tout sera prétexte pour affaiblir et abattre la seule opposition ayant de prime abord une chance raisonnable de provoquer une alternance. Le moindre geste, la moindre parole donnera lieu à un procès en sorcellerie. Ce contexte politique est évidemment pour quelque chose dans cette polémique absurde. Mais ce ne sera pas la dernière.

3 Quelles sont les répercussions possibles à court terme et à plus long terme sur la vie de ce parti ?

Il faut voir, selon la réaction des dirigeants de LR. Si le procédé d’intimidation fonctionne, le risque serait de voir l’équipe actuelle renoncer à défendre la nation, les frontières, l’autorité de l’Etat, tous ces principes désuets et maudits, pour se fondre avec l’idéologie post nationale. Dès lors, l’échec sera inévitable. Ce qui peut distinguer les Républicains de LREM, c’est justement de s’appuyer sur l’idée nationale et sur l’attachement sans honte à la France. Si les républicains renoncent à parler de la France, ils seront inévitablement broyés entre LREM et le parti lepéniste. Leur véritable chance est bien au contraire de ne pas céder à l’intimidation et de revendiquer haut et fort la fierté d’être Français, en se situant à la rencontre d’une France fière de son histoire, de sa culture de sa langue, mais aussi d’une France ouverte sur la modernité, les technologies, le rayonnement international. La France des Républicains devrait être celle qui protège les Français contre l’instabilité planétaire et assure leur destin commun. Tendre la main au 79% qui sont fiers d’être Français: ce devrait être la ligne de conduite de LR nonobstant tous les obstacles qui seront mis sur son chemin.

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Author: Redaction