La dictature de la bêtise

sans-titrePrenons de la hauteur. Le marasme dans lequel nous baignons est le fruit à long terme de l’affaiblissement de l’esprit critique, de l’effondrement de l’enseignement de l’histoire, de la littéraire, de la philosophie. La bêtise est le grand vainqueur de ce monde. Les citoyens sont des consommateurs, soumis à une manipulation permanente. Nous ne savons plus réfléchir, regarder les choses en perspective. La politique devient chaque jour un peu plus l’otage des images médiatisées et des réseaux sociaux. Elle évolue sans cesse vers le grand spectacle, le sensationnel. Elle se réduit à l’émotionnel et aux sentiments qu’inspirent tel ou tel personnage. Elle se rapporte à des jeux d’images, à des sensations, à des impressions. Le fond des choses disparaît derrière le paraître. Les slogans remplacent les idées. La manipulation de masse se substitue à la volonté générale. L’idolâtrie, le culte de la personnalité écrasent tout. Les idoles et les foules hystériques venues acclamer le néant : il est phénoménal de songer que depuis des années 1920, 1930 et 1940, nous n’avons rien appris et rechutons dans les mêmes pièges. C’est pourquoi nous voyons la politique fuir jour après jour du monde des réalités et s’en retourner vers l’utopie, l’idéologie, l’extrémisme sous toute ses formes : attiser les passions, jeter aux visages des électeurs rêves ou cauchemars et des annonces débiles. Le système présidentialiste français en est le grand coupable. Il est le produit, ou le complice du déclin de l’intelligence – au sens de l’esprit critique. La politique consiste désormais à vendre un personnage armé de son slogan, un acteur, un comédien, et non plus un projet collectif. Elle devient affaire de séduction ou la passion – haine ou amour – finit par broyer le sens des réalités et du bien commun. Manipulations, séduction, illusions provoquent la mort de la politique et au fond, de la démocratie. Quand le débat d’idées national s’estompe devant le paraître, la dictature de l’image et des postures plus nous roulons à l’abîme. La grande dérive de la politique française s’accélère autour d’un culte de la personnalité exacerbé, de chiffons rouges et de leurres. Se prosterner devant un sourire jeune et avenant ou des braillements hystériques couvrant les pires lieux communs: le déclin de l’intelligence politique touche à son paroxysme. Pourquoi devenons-nous si bêtes ? Peu importe. Il est monstrueux de constater à quel point la politique française devient une affaire de choix de personne et non plus de projet collectif. Elle s’adresse aux passions infantiles – le choix d’un père ou d’une mère – et non plus à la raison du citoyen. Dans un climat général soumis au culte de la personnalité, nous avons oublié que la politique, le bien commun, est une affaire d’unité, de projet collectif. La politique est à réinventer, peut-être sous une forme différente. Il est indispensable de réhabiliter le collectif et le débat d’idées. Sinon, nous irons vers une situation ou la vie publique ne sera plus que scandales, polémiques, haines et idolâtries, mensonges et manipulations. La politique sans unité, sans dépassement des individus, sans réflexion de fond, la politique soumise à l’ego malade de personnages d’une infinie médiocrité, la politique sans collectif, livrée à l’esbroufe médiatique, au sensationnel, au jeu du lynchage et de l’idolâtrie, est le plus court chemin vers une dictature, mais pas n’importe laquelle : la pire, celle qui vient, la dictature de la bêtise. Seule une recomposition politique majeure et l’émergence de nouvelles énergies tournées vers un projet, et non plus les mirages, les illusions, les chimères et les idoles, peut permettre de réconcilier durablement la France avec la politique. Comment provoquer la prise de conscience, revenir au bon sens, à l’intelligence collective? C’est ce que j’ignore…

Maxime TANDONNET


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Author: Redaction