Interview de Marisol TOURAINE à Libération : «Le dénigrement, ça suffit !»

Marisol TOURAINE a répondu aux question de Lilian Alemagna, journaliste à Libération, pour une interview publiée dans le quotidien ce lundi 25 avril 2016.

Vous pouvez lire l’interview ci-dessous ou sur le site de Libération en cliquant ici.

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La ministre des Affaires sociales et de la Santé, qui sera présente à la réunion de soutien à François Hollande, défend le bilan social du chef de l’Etat.

Elle fait partie de ces ministres qui prendront la parole ce lundi au rassemblement «Hé oh la gauche !», organisé à Paris. Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la Santé, défend le «bilan» du gouvernement en la matière et exhorte les siens à «s’assumer de gauche».

A un an de la présidentielle, on a l’impression qu’il est urgent de parler à votre gauche ?

Il faut parler à la gauche et à tout le monde. Le travail que nous avons effectué depuis quatre ans est considérable : nous avons rendu à la France le rang qui est le sien. Nous avons réduit les inégalités, non pas seulement en préservant notre modèle social mais en le réformant et en offrant plus de libertés aux Français. Je le dis : le dénigrement, ça suffit ! La gauche au pouvoir n’a pas à rougir de son bilan. J’appelle tout le monde à redresser la tête. Face à une droite qui ânonne de vieilles recettes libérales et au repli identitaire que propose l’extrême droite, la gauche doit afficher sa vision positive et conquérante de l’avenir. A un an de l’élection présidentielle, les jeux ne sont pas faits.

Mais comment expliquer que vous devez taper du poing sur la table pour rappeler ce «bilan social» ?

On peut nous faire le reproche de ne pas avoir su porter collectivement nos réalisations sociales et d’avoir privilégié d’autres orientations. Or, le bilan est là : pour la première fois depuis 2004, le régime des retraites est à l’équilibre ; la modulation des allocations familiales a conduit à une revalorisation de 25 à 30 % pour les familles les plus démunies ; le versement des pensions alimentaires est désormais garanti par l’Etat ; la généralisation des complémentaires santé a offert une meilleure couverture pour plus d’un million de personnes qui n’en avaient pas ; le tiers payant se met en place progressivement ; le déficit de la Sécu a été réduit sans le moindre déremboursement et nous venons de créer la prime d’activité pour les travailleurs modestes. Il faut revendiquer ce bilan, non pas comme un simple inventaire, mais comme une politique d’innovation et de modernisation sociale. Et comme une politique de gauche. Parce que lorsqu’on n’est «ni de droite, ni de gauche», on finit par être nulle part.

Justement, ce positionnement est défendu par Emmanuel Macron mais aussi d’autres ministres qui préfèrent parler de «progressistes» et de «conservateurs»…

La gauche, c’est le progrès. Oui, il y a des progressistes et des conservateurs. Et une recomposition politique peut être nécessaire. Mais, d’une part, cela ne peut se faire avant une élection et, d’autre part, il doit se réaliser autour des idées, sur des projets. Je ne crois pas à la pétition de principe qui ferait croire que tout le monde peut discuter avec tout le monde. Si recomposition politique il doit y avoir, cela doit se faire à partir de nos idées : par exemple, on ne peut pas se passer de politiques sociales si nous voulons faire reculer les inégalités.

Pourquoi ce discours social arrive-t-il si tard ?

Je n’ai jamais cessé de le faire. Nous sommes à la jonction entre le bilan et le projet. Certes, on ne gagne pas une élection sur un simple bilan. Mais on ne gagne pas non plus en rognant sur nos idées. Il faut désormais s’atteler à la construction d’un projet positif pour une France qui bouge, ouverte sur l’Europe et le monde, conquérante.

Pour, à la fin, se ranger derrière François Hollande…

François Hollande est président de la République. Il est donc légitime qu’il se présente à un nouveau mandat s’il le décide. Si c’est le cas, il sera le candidat d’un projet cohérent qui pourra s’appuyer sur un bilan. D’où le devoir qui est le nôtre, aujourd’hui, de rappeler ce qui a été déjà fait depuis quatre ans.

En faisant l’économie d’une primaire à gauche, y compris avec François Hollande ?

Le Parti socialiste a fait un choix [celui d’un accord de principe pour une primaire à gauche si les vaincus acceptent de soutenir le vainqueur et une décision finale en juin, ndlr] et a fixé des règles. Attendons de voir ce qu’il en est. A François Hollande de dire ce qu’il choisit de faire au moment où il le jugera le plus opportun.

Lilian Alemagna

Author: Redaction