Facebook Live du 26 février au Salon de l’Agriculture

Edouard PHILIPPE
Bonjour à tous. Et bienvenue pour cette nouvelle édition qui est exceptionnelle aujourd’hui, d’abord, parce que nous ne sommes pas dans mon bureau à Matignon, nous sommes au Salon de l’Agriculture, que vous voyez derrière nous, et parce que je suis aujourd’hui avec Stéphane TRAVERT, le ministre de l’Agriculture, et que nous allons dédier cette demi-heure passée à répondre à vos questions aux questions de l’agriculture, de l’alimentation, aux discussions sur les négociations internationales, aux discussions sur les états généraux de l’alimentation, bref, essayer de répondre à toutes les questions qui se posent et qui passionnent les Français sur le monde agricole.

Avant de poser la première question à Stéphane et avant de commencer à répondre à votre question, un mot pour dire que j’ai commencé à la journée avec Stéphane TRAVERT et avec Jean-Michel BLANQUER, le ministre de l’Education nationale, avec des lycéens et des étudiants qui étudient en lycée agricole. Et je dois dire que ça a été une rencontre tout à fait passionnante, d’abord, parce qu’ils envisagent leur avenir avec beaucoup de confiance, avec beaucoup de travail aussi, et on a eu en face de nous des gens passionnés, des gens déterminés à défendre la richesse incroyable qu’est la France agricole dans ses produits, dans ses process, dans sa diversité, y compris dans ses Outremers, puisqu’on avait un jeune lycéen de Guyane.
Et que c’était vraiment une très bonne façon de commencer cette journée, et puis qu’ensuite, on a déambulé dans les allées, on a rencontré des éleveurs, des producteurs, des viticulteurs. Je dois dire que l’accueil a été très chaleureux, les échanges ont été, à la fois très respectueux et très sérieux, et que c’est vraiment une expérience assez extraordinaire que d’aller au Salon de l’Agriculture, les Français adorent le Salon de l’Agriculture, il y a un nombre considérable de visiteurs tous les ans. Mais ça vaut vraiment le coup, et si vous êtes sur Paris, pendant cette semaine, n’hésitez pas à vous y rendre.

Alors première question peut-être à Stéphane TRAVERT, on parle beaucoup des états généraux de l’alimentation, est-ce que tu peux nous dire ce qui a été fait jusqu’à présent et ce que nous allons faire dans les mois qui viennent.

Stéphane TRAVERT
Bien sûr, mais, les états généraux de l’alimentation, ils ont été lancés le 20 juillet dernier, c’est une grande consultation qui a permis de faire se rencontrer tous les acteurs du monde agricole, les acteurs de la transformation, les acteurs de la distribution, pour quoi faire ? Pour permettre demain à nos agriculteurs de vivre dignement de leurs revenus, et de faire en sorte que notre agriculture, demain, reprenne la première place de l’agriculture en Europe.

Aujourd’hui, les états généraux, c’est un plan de filières, des plans de filières que nous avons demandés à toutes les filières de travailler pour connaître leurs envies, connaître ce qu’elles veulent faire sur l’export, sur le marché national, sur les engagements sociétaux qui sont qui sont les leurs, et puis, c’est aussi un projet de loi, un projet de loi que nous allons défendre à l’Assemblée nationale à partir de la fin du mois de mars et début du mois d’avril.

Ce projet de loi, il va nous engager bien évidemment à travailler sur la notion de contrat, à partir de demain, les agriculteurs proposeront un contrat aux distributeurs ou aux transformateurs, ce qui leur permettra de ne plus vendre leurs produits à perte, et puis, nous aurons bien évidemment un bon nombre de solutions à travers ce projet de loi qui tiendra compte de la feuille de route qu’avait présentée le Premier ministre au mois de décembre dernier sur la politique alimentaire de la France, sur les engagements sur l’agriculture biologique, sur les engagements sur la sortie et la réduction de l’utilisation des pesticides et des phytosanitaires.

Bref, cette grande consultation au service de notre agriculture, elle a démarré au mois de juillet dernier, nous travaillons avec chacun des acteurs du monde agricole pour faire en sorte que, demain, notre agriculture soit au rendez-vous de la performance économique, sociale, environnementale et sanitaire.

Edouard PHILIPPE
Merci beaucoup, et – merci beaucoup – on aura l’occasion d’y revenir parce que je crois qu’il y a pas mal de questions là-dessus, mais les l’exercice auquel on se livre est très important, parce que, on veut changer la logique de fixation des prix dans le modèle agricole, c’est une vraie révolution qu’on essaie de favoriser.

Première question, Alexandra LOT (phon) me dit : je trouve qu’il y a un dicton qui répond exactement au questionnement, je le site : comment voulez-vous gouverner un pays où il existe 258 variétés de fromages ? Bon courage Monsieur le Premier ministre. Je remercie Alexandra pour ses encouragements.

Cela dit, je crois que l’expression du Général De GAULLE sur les 258 fromages, mais au fond, c’est une bonne façon d’aborder la question, à la fois, de ce que nous faisons, et de ce qui est possible de faire en France. Pour une raison simple, c’est que ces 258 variétés de fromages, c’est une richesse. Il ne faut pas du tout le voir comme un problème, il faut le voir évidemment comme une richesse, comme une richesse culturelle, la diversité, ça fait partie de ce qu’on est, comme une richesse économique.

Et d’ailleurs, ce qui est très intéressant, c’est que, à l’extérieur, partout dans le monde, on ne connaît pas les 258 variétés de fromages on en connaît quelques-unes qui sont très emblématiques ; et on sait que les Français aiment le fromage. Et donc c’est une façon d’identifier ce que nous sommes, donc derrière cette diversité, il y a évidemment une très grande unité et une très grande excellence dans cette production. Et je trouve que d’une certaine façon, ça résume bien ce qu’on veut faire.
Un mot quand même pour dire que dans les négociations internationales qui ont lieu en ce moment, ça a été vrai avec le Canada, dans le cadre du CETA, c’est vrai dans l’Amérique du Sud, c’est vrai aussi dans d’autres négociations internationales, la question des exportations, de la protection et des exportations des fromages français est une question que nous plaçons au cœur des discussions, et qui est placée au cœur des discussions.

Et nous ouvrons un certain nombre de marchés, on parle souvent de ces grands traités internationaux comme des moments où certains produits étrangers peuvent être commercialisés en France, ils font une concurrence en France à des produits français, mais il faut aussi voir l’autre aspect, c’est la capacité des produits français à être exportés et à concurrencer sur place des produits locaux ou à prendre des parts de marché, et donc c’est évidemment important pour les producteurs de fromages français, et l’accord sur le CETA notamment est très favorable en termes de reconnaissance des appellations et de protection de la distribution et de la production.

Peut-être une question sur justement, Stéphane, sur la question de Fabian qui nous dit : quelle est la position actuelle de la France concernant les négociations commerciales avec le Mercosur, et plus précisément les contingents de bœuf et d’éthanol ?

Stéphane TRAVERT
Eh bien, sur le Mercosur, aujourd’hui, la position de la France, elle a été très claire et elle a été rappelée par le président de la République, d’abord, nous défendons notre filière bovine française, et la France, elle a posé des conditionnalités, conditionnalités sur d’abord les contingents, contingents de bœuf, entre viande fraîche et viande congelée, et puis, des conditionnalités sur nos standards de qualité, la France, c’est une qualité, c’est une démarche de qualité, et nous avons posé des conditionnalités très fortes sur la qualité sanitaire, mais aussi la traçabilité de nos aliments. Et donc aujourd’hui, avec ces lignes rouges qui ont été rappelées d’ailleurs au commissaire Phil HOGAN, à Jean-Claude JUNCKER, nous considérons que, aujourd’hui, en l’état, sur la filière bovine, l’accord ne peut pas être mis en œuvre, et nous avons souhaité porter des conditionnalités fortes, notamment sur une clause qui, si le l’accord était signé, et lorsqu’il serait mis en œuvre, si, demain, nous avions la preuve que les cours étaient, je dirais, fragilisés à cause de ces apports de contingents, eh bien, nous n’hésiterions pas à remettre, à demander cette clause de sauvegarde qui nous permettrait de protéger notre filière.

Et il en va ainsi sur l’ensemble de l’accord, aujourd’hui, cet accord n’est pas encore signé, mais nous souhaitons quand même, et nous avons rappelé que nos lignes rouges, elles étaient fermes, mais elles étaient fortes, et nous continuons à travailler avec l’Union européenne pour faire en sorte de défendre les qualités de notre filière bovine française, et nous le faisons d’ailleurs au niveau européen, avec 12 autres pays qui portent les mêmes exigences que notre filière française.

Edouard PHILIPPE
Cyrille pose la question suivante : le problème, c’est que le consommateur est distinct du citoyen, le citoyen veut aider les agriculteurs du bio, il veut de la qualité, etc., et le consommateur, lui, veut des prix très bas, et cela n’est pas conciliable. Il faut que l’on voie notre responsabilité. Cyrille n’a pas tort, c’est vrai que, on est tous un peu, je ne sais pas comment il faut dire, un peu schizophrènes, on voudrait à la fois une très grande qualité et payer le moins cher possible, on voudrait à la fois préserver le commerce de centre ville et en même temps, eh bien, la majorité de nos concitoyens fait ses courses dans les grandes surfaces en périphérie des villes. On est parfois un peu hésitant, et on ne concilie pas toujours des priorités qui sont parfois peu compatibles.

Sur l’agriculture, ce qu’on veut, c’est justement sortir de ce caractère un peu inconciliable. On veut faire en sorte, pour permettre à l’agriculture de se développer, pour permettre à l’agriculture d’être pérenne sur le territoire, partout sur le territoire français, pour permettre aux agriculteurs de vivre de leur travail, on veut faire en sorte que dans le prix que paie le consommateur, il y ait une part très juste qui revienne au producteur, parce que, entre le producteur, qui cultive la pomme de terre ou qui élève son troupeau, et le consommateur, il y a plein de gens qui interviennent, l’industrie agroalimentaire, des transformateurs, de distributeurs, et, bien souvent, la valeur ajoutée, elle est captée par ces transformateurs et par ces distributeurs, nous, ce qu’on veut, c’est qu’elle revienne aux producteurs.

Et pour ça, c’est le mécanisme qu’a évoqué déjà Stéphane TRAVERT, sur lequel, on a travaillé avec l’ensemble des filières et avec l’ensemble des acteurs, qui s’est d’abord traduit par une charte, mais je sais très bien qu’une charte, c’est déclaratif, et donc on ne peut pas espérer qu’une charte à elle seule suffise à organiser cette affaire, c’est pour ça qu’il y aura dans le projet de loi – que Stéphane TRAVERT a présenté en Conseil des ministres à la fin du mois de janvier, et qui sera discuté au Parlement, assez rapidement – c’est pour ça qu’il y aura des dispositifs qui permettent de construire les prix agricoles en fonction des éléments objectifs donnés par le producteur, et qui permet ensuite d’éviter des reventes à perte qui viennent comprimer justement ce prix qu’on vient donner aux producteurs, et ça, c’est un changement très important qui permet de faire en sorte de conserver le futur, le présent d’abord, et le futur de notre agriculture.

Et cette question-là, elle n’a jamais vraiment été abordée, c’est-à-dire que tout le monde sait que, il y a une compression du prix pour le producteur, tout le monde le déplore depuis des années, mais jusqu’à présent, on n’avait pas véritablement trouvé la bonne façon de s’attaquer au problème, c’est pour ça qu’on essaye dans ces états généraux de l’alimentation – sans se faire d’illusions sur le fait que les logiques économiques et les grandes logiques économiques sont toujours à l’œuvre – qu’on essaie d’inverser les choses et de préserver la capacité du producteur à vivre de son travail ; c’est un défi considérable, mais c’est un défi qui va exactement dans le sens de ce que Cyrille nous invitait à faire.

Une question sur les herbicides, c’est Joseph qui la pose, pourquoi n’interdit-on pas au plus vite l’ensemble des herbicides en agriculture, sachant, dit-il, qu’ils sont très probablement cancérigènes, même si on a du mal à le prouver, comme c’est souvent le cas en épidémiologie, des taux de cancers de la prostate plus élevés dans les DOM-TOM par exemple. Stéphane, sur cette question des herbicides.

Stéphane TRAVERT
Sur la question des herbicides, plus largement des produits phytosanitaires, et du glyphosate, qui a des défrayé l’actualité ces derniers mois, le gouvernement s’est engagé pleinement et fermement, d’abord, le président de la République a demandé à ce que nous puissions trouver des solutions en trois ans, pour la sortie du glyphosate. Donc nous avons besoin de mobiliser la recherche, l’INRA, les instituts techniques, et dans le rapport qu’ils avaient remis, ils avaient été clairs : il n’existe pas aujourd’hui de solutions clés en main, il nous faut travailler, accompagner les agriculteurs, créer la trajectoire qui va leur permettre de réduire petit à petit l’utilisation des produits, des produits phytosanitaires.

Et aujourd’hui, cela passe par la rotation des cultures, c’est l’innovation sur les sols, c’est la mécanique et l’agriculture de précision, c’est l’agriculture connectée qui peut nous aider à trouver des solutions pour nous passer de ces produits. Aujourd’hui, nous sommes engagés dans une démarche, nous avons d’ailleurs lancé une concertation avec le ministère de la Santé, le ministère de la Transition écologique et solidaire, et, bien sûr, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, une grande concertation avec l’ensemble des acteurs, les acteurs agricoles, les acteurs de la de la recherche, et les ONG, pour faire en sorte de trouver ensemble des solutions pour diminuer l’impact des produits phytosanitaires sur notre sol, et produire une alimentation plus saine, plus sûre et de qualité.

Parce que nous avons besoin aujourd’hui d’accompagner la meilleure santé de notre environnement, cela fait partie de la feuille de route sur la politique alimentaire que nous avons portée et que nous allons détailler dans les semaines et les mois à venir.

Edouard PHILIPPE
Cyrielle pose une question, enfin, qui n’est pas vraiment une question, qui est plutôt de recommandations, commençons par cesser d’assommer nos agriculteurs avec une réglementation et des cahiers des charges qui ne permettent pas de travailler décemment. Eh bien, Cyrielle n’a pas tort, c’est vrai que, on a développé, quand je dis « on », ce n’est pas forcément nous d’ailleurs, mais enfin l’Union européenne, d’abord, mais la France peut-être encore plus que l’Union européenne a développé une très mauvaise habitude depuis des années, ça fait des années que ça dure, 10, 20 ans, mais ça s’accélère, de demander et d’encadrer, avec des normes de plus en plus complexes et des procédures de plus en plus complexes, l’activité agricole, et on a tous des exemples dès qu’on parle avec des éleveurs, dès qu’on parle avec des agriculteurs, du temps passé par les agriculteurs français à indiquer qu’ils sont bien dans la procédure, dans telle production, dans telle consommation de surface, dans telles doses d’intrants qui rentrent dans la production, on les a transformés, pas simplement en producteurs attachés à leurs produits, mais on les a transformés en administrateurs d’une économie sur-normée, c’est absurde. Et franchement, la France a une part de responsabilité à ça, parce qu’on a une certaine tendance à rajouter des normes en plus des normes européennes qui sont demandées, comme si chaque couche d’administration rajoutait une couche supplémentaire de normes pour être bien sûr qu’on est exactement comme il fallait. C’est absurde et il faut lutter contre ça.

Alors, on le fait de deux façons, d’abord, en essayant de ne pas produire plus de normes qu’avant, c’est-à-dire, en essayant de comprimer la production de normes actuelles, le flux, si j’ose dire. Et ça, pour l’instant, on a des résultats qui ne sont pas trop mauvais, parce qu’on a mis une pression très forte sur les administrations pour qu’elles arrêtent de produire des circulaires ou des normes. Ce n’est pas facile, mais on essaie de le faire.

Deuxième chose, on a récemment présenté et discuté une loi sur la société de confiance, qui a prévu des simplifications de procédures dans un certain nombre de domaines, et notamment dans le domaine agricole.

Troisième chose, nous avons décidé qu’à chaque fois qu’un projet de loi serait préparé par le gouvernement, il y aurait, à la fin de ce projet de loi, toute une série d’articles qui viseraient à supprimer des procédures ou à supprimer des obligations normatives qui pèsent aujourd’hui sur l’ensemble des Français, et donc en matière agricole, sur les agriculteurs, et dans le projet de loi sur les états généraux de l’alimentation, il y a un certain nombre de dispositions, de simplifications, parce qu’il faut qu’on arrête de sur-complexifier, de sur-normer l’exercice de la profession agricole. En faisant ça, on ne rend service à personne, je ne suis pas sûr qu’on rende service aux consommateurs, je suis certain qu’on gêne le producteur, et il faut évidemment lutter contre ça, c’est clairement, clairement notre volonté.

Je regarde quelle question nous n’aurions pas encore évoquée, il y a une question difficile de Grégoire, mais je crois qu’il faut la traiter, le taux de suicides chez les agriculteurs est bien plus élevé que la moyenne, ce qui traduit les difficultés que beaucoup d’entres eux connaissent. Que comptez-vous faire, nous demande-t-il, pour améliorer les conditions de vie des agriculteurs ? Comment lutter contre le mal-être des agriculteurs ?

Stéphane TRAVERT
D’abord, la première réponse que nous pouvons apporter, c’est de dire qu’on ne sous-estime pas, ni ne mésestimons la détresse des éleveurs et d’un bon nombre d’agriculteurs dans notre pays. Elle nous est connue et nous travaillons sans relâche bien évidemment sur cette question. D’abord, le bien-être des agriculteurs, c’est de faire en sorte que, demain, ils retrouvent la fierté de faire leur travail, c’est de leur donner la capacité à croire dans leur avenir, c’est de leur donner la capacité à pouvoir investir, à pouvoir innover, et cela passe par la question tout simplement du revenu agricole. Pour autant, nous devons accompagner celles et ceux qui sont les plus fragiles des agriculteurs.

Et un certain nombre de dispositifs ont été mis en place. C’est le dispositif Agri’écoute, qui est là pour essayer de trouver des solutions individualisées pour chacun des agriculteurs, qui a besoin d’une écoute particulière. Et puis, c’est le droit au répit, c’est permettre à un agriculteur, un temps donné, eh bien, d’aller partir se reposer pendant quelques semaines, de décompresser, de sortir de son exploitation en donnant les capacités à cette exploitation de pouvoir continuer à être entretenue avec une brigade de remplacement.

Et ce dispositif, il permet aux gens, je dirais, de revenir un peu sur eux-mêmes et de pouvoir travailler à ce qu’ils veulent faire et à les séparer un peu de leur exploitation, où ils connaissent de la détresse et de la difficulté, pour mieux les réinsérer d’ailleurs dans leur travail et dans leur métier ensuite. Et donc d’aujourd’hui, parce que nous voulons travailler sur l’aspect social qui nous tient à cœur, sur la solidarité qui doit exister aussi entre les éleveurs, nous prenons bien évidemment en compte cette question du suicide et du mal-être chez beaucoup d’agriculteurs.

Nous avons eu l’occasion de rencontrer des femmes d’agriculteurs qui avaient vécu cette détresse, ce sujet est parmi nos priorités, et parce que nous travaillons sur le revenu des agriculteurs, nous saurons demain trouver des solutions pour faire en sorte que ceux-ci puissent revenir avec de l’espoir et puissent porter de nouveaux projets.

Edouard PHILIPPE
Une question, une question qui est posée par Rémy. Pourquoi vouloir mettre en concurrence les agriculteurs français avec les agriculteurs canadiens, brésiliens, argentins ou d’autres pays, nous n’avons pas les mêmes règles fiscales ni les mêmes valeurs environnementales, et nous n’avons pas le même niveau social, ne serait-ce pas de la concurrence déloyale ? Cela ne risque-t-il pas de baisser la qualité des produits français et d’ailleurs ?

C’est une bonne question, et je voudrais essayer d’y répondre en reconnaissant que, d’abord, il y a un certain nombre de gens qui, j’allais dire, presque par nature, ne croient pas aux bienfaits du commerce international, parfois, ils ne le disent pas comme ça, mais enfin, fondamentalement, c’est à ça que ça rien, ils considèrent que le commerce international, la concurrence, le fait que, on puisse commercer très loin, et être en concurrence avec des producteurs locaux, c’est forcément une mauvaise chose.

Alors évidemment, pour ceux-là, je vois mal comment démontrer et comment justifier le fait que nous nous pensons que l’agriculture française, les agriculteurs, la France a tout à gagner à ouvrir des marchés et accepter un degré de concurrence, à certaines conditions, bien entendu, je vais y revenir. Mais nous en sommes convaincus.

D’abord, un mot, quand on ouvre des marchés en France à des concurrents étrangers qui ne sont pas forcément des concurrents qui produisent dans des conditions sociales très défavorables par rapport à celles qui prévalent en France, le Canada, ce n’est pas très différent en termes de protection sociale, il peut y avoir des façons de produire différentes, j’y reviendrai, mais ce n’est pas très défavorable en matière de protection sociale par rapport à ce qui se passe en France.

Quand on ouvre des marchés en France, en Allemagne pour les producteurs canadiens, la contrepartie, c’est qu’on ouvre des marchés au Canada pour les producteurs français et pour les producteurs allemands. Et il ne faut pas perdre de vue les deux choses, il y a un certain nombre d’accords qui nous ont ouvert des marchés et qui nous ont permis de gagner des marchés, quand tout à l’heure, nous sommes allés avec Stéphane TRAVERT, sur le stand des viticulteurs, du vin, des spiritueux, des brasseurs, il voient d’un très bon œil l’ouverture des marchés internationaux, parce que, ils savent que pour eux, c’est la possibilité de vendre plus, d’augmenter leurs exportations, d’augmenter leurs revenus, c’est la même chose, on le disait, pour les fromages et tout à l’heure.

Alors ce qui est vrai, c’est que, il faut faire attention que, en France, les agriculteurs, notamment je pense aux éleveurs, parce que c’est la discussion générale qui se passe sur le Mercosur, ne souffrent pas de la concurrence. Deux mots là-dessus, tout à l’heure, nous sommes allés voir la star du salon…

Stéphane TRAVERT
Haute…

Edouard PHILIPPE
Qui s’appelle Haute et avec sa génisse qui s’appelle Olympe, bon. C’est une vache de la race Aubrac. Les producteurs, les éleveurs, pardon, qui étaient là, qu’est-ce qu’ils nous ont dit ? Ils nous ont dit : on n’a pas peur de la concurrence, nous, on fait de l’excellence, on n’a pas peur de la concurrence, la seule chose dont on a peur, c’est que les normes sanitaires utilisées à tel endroit ne soient pas les mêmes que les nôtres, parce que, là, pour le coup, ça voudrait dire que, on ferait une concurrence par la moindre qualité, et ça, ce ne serait pas acceptable, bon. Mais c’est justement quelque chose sur lequel on a tracé une ligne rouge extrêmement ferme, les normes sanitaires, les normes de qualité applicables dans l’Union européenne, elles ne disparaissent pas quand on signe un accord avec d’autres pays ou d’autres continents que l’Europe.

Elles restent en vigueur, c’est essentiel, parce que c’est une garantie pour le consommateur, et c’est aussi une garantie pour les éleveurs de concurrence loyale. Donc on est, là-dessus, extrêmement ferme, je pense qu’on n’a rien à gagner à imaginer que le protectionnisme garantirait l’avenir de l’économie française. Ça n’est pas vrai, ça n’a jamais été vrai.

Et pour une économie comme nous qui exporte, les producteurs de porcs nous l’ont dit, exporter, pour eux, c’est indispensable, mais s’ils veulent exporter, il faut qu’il y ait des marchés à l’extérieur qui soient ouverts, en Chine, bon. Eh bien, si on n’ouvre pas nos marchés, il est assez certain qu’à l’extérieur, on va les fermer, et donc que nous ne pourrons plus exporter là-bas. Donc il faut regarder ça globalement, en faisant très attention à ne pas être naïf, et on n’a aucune envie de l’être, mais en assumant le fait que nous pouvons gagner, nous pouvons avoir aussi un intérêt à ouvrir des marchés à l’extérieur.

On va prendre une dernière question. Lucas pose une question sur : qu’en est-il des mesures d’application de la charte qui a été signée à l’issue des états généraux et qui peine aujourd’hui à être respectée par les distributeurs, eh bien, Lucas a raison, et d’ailleurs, on n’est pas surpris, la charte, c’est une déclaration d’intention, et on voit bien qu’il y a un certain nombre de gens qui ont envie de s’exonérer de cette déclaration d’intention. C’est pour ça qu’on va la mettre dans la loi. Et c’est pour ça qu’on ne va pas s’arrêter simplement à une charte, et c’est pour ça aussi qu’on a dit très clairement aux distributeurs ou aux transformateurs que, on allait être extrêmement attentif à la façon dont ils la mettaient en œuvre, parce que ça va nous permettre de calibrer la loi. Et enfin…

Stéphane TRAVERT
Commentaire sur l’enseignement agricole public par apprentissage, c’était la thématique de ce matin, et, encourager l’apprentissage dans l’agriculture, encourager la formation dans les lycées, dans les lycées agricoles, c’est un travail que nous menons, c’est une des priorités du ministère de l’Agriculture et de l’alimentation, parce que nous avons besoin de jeunes qui soient bien formés sur les techniques d’élevage, sur les cultures, et à gérer aussi les entreprises agricoles, parce que les entreprises agricoles, eh bien, elles ont besoin de compétitivité, elles ont besoin de visibilité, et elles ont besoin de gens qui soient bien formés et qualifiés pour affronter les défis de notre agriculture de demain.

Edouard PHILIPPE
Voilà, on a répondu à un certain nombre de questions, on va s’arrêter pour aujourd’hui. Je sais que le ministre de l’Agriculture et de l’alimentation va être sur le Salon jusqu’à sa fermeture, moi, je reviendrai demain, je reviendrai jeudi matin, parce que les questions agricoles sont des questions qui sont à la fois importantes économiquement, importantes humainement et importantes, j’allais dire, pour notre pays, compte tenu de la place éminente que joue l’agriculture dans ce que nous sommes et dans notre attachement à ce qu’est la nation française. Donc ce sont des sujets importants, nous y sommes présents, nous allons continuer à les défendre. Merci beaucoup.

Stéphane TRAVERT
Merci. Au revoir.

Author: Redaction