Déclaration de M. Bernard Cazeneuve – Vendredi 21 avril 2017

Seul le prononcé fait foi

Hier soir, la France a été frappée à nouveau. Un policier a été lâchement assassiné sur les Champs Elysées ; deux autres sont grièvement blessés.

Alors que l’heure est à la dignité, à l’unité et à la responsabilité, certains candidats à l’élection présidentielle ont fait ce matin le choix de l’outrance et de la division.

Marine Le Pen demande la restauration immédiate de nos frontières nationales. Elle fait mine d’ignorer que c’est ce gouvernement qui a rétabli le contrôle aux frontières. Depuis le 13 novembre 2015, le jour précis du rétablissement de ce contrôle,  plus de 2300 policiers et gendarmes sont mobilisés chaque jour à nos frontières. Marine Le Pen oublie que plus de 105 millions de personnes y ont été contrôlées depuis cette date, et que 80 000 n’ont ainsi pas pu entrer sur le territoire national. Sur ce sujet, comme sur les autres, il faut rétablir la vérité.
Marine Le Pen demande l’expulsion de tous les fichés S. Je veux lui rappeler que depuis mai 2012, 117 personnes ont été expulsées du territoire pour des activités à caractère terroriste, dans le cadre de l’Etat de droit. La plus grande fermeté prévaut donc en la matière, sans arbitraire et dans le respect rigoureux des principes républicains. Madame Le Pen demande aussi la poursuite des individus fichés S pour intelligence avec l’ennemi. Elle démontre ainsi sa méconnaissance des dispositifs relatifs à la lutte antiterroriste, et notamment, de notre arsenal pénal. La conséquence de sa proposition, serait des sanctions moins fermes que celles établies par les lois antiterroristes que nous avons votées – et auxquelles elle s’est par ailleurs toujours opposée -, et des enquêtes aussi moins efficaces.

Je veux rappeler à Marine Le Pen qu’en matière de lutte contre le terrorisme – qui est une lutte difficile – , la facilité n’est pas la fermeté, ni l’outrance le gage de l’efficacité.

Marine Le Pen demande le renforcement des moyens de renseignement de notre pays. Elle oublie que son parti a voté contre toutes les lois antiterroristes. Elle oublie de dire aux français que son parti a voté contre la loi renseignement de juillet 2015 qui donnait des moyens nouveaux aux services de renseignement pour prévenir les actes terroristes. Elle oublie que son parti a voté contre les dispositions antiterroristes présentées au parlement européen, notamment le PNR qui permet de disposer des informations nécessaires à l’arrestation des terroristes au moment de leur retour sur le territoire européen.
Elle semble donc délibérément oublier tout ce qui a été fait depuis cinq ans, pour faire oublier, en réalité, qu’elle s’est opposé à tout sans jamais rien proposer de sérieux ni de crédible.

Marine Le Pen ose demander de nouvelles régulations restrictives en matière d’immigration, d’asile et d’accession à la citoyenneté. Mesdames et messieurs, ces propos, plus que tout autres, révèlent son véritable objectif. La candidate du Front national cherche, comme après chaque drame, à profiter et à instrumentaliser pour diviser ; elle cherche à exploiter sans vergogne la peur et l’émotion à des fins exclusivement politiciennes. Rien, aucun élément d’enquête, aucun renseignement ne permet de faire quelque lien que ce soit entre l’immigration, l’asile, et ce qui s’est passé hier soir à Paris.

Pour l’ensemble de nos concitoyens, pour notre pays entier, cette attaque est un drame. Madame Le Pen cherche à en faire une opportunité, une occasion médiocrement électorale, au mépris de la vérité.

Quant à François Fillon, il appelle à la révision des accords de Schengen. Cette révision a été engagée au cours de ce quinquennat, alors que constamment évoquée entre 2007 et 2012, elle n’avait fait l’objet d’aucune initiative, ni n’avait abouti à aucun résultat. C’est sous l’impulsion de ce gouvernement que la France a obtenu la modification de l’article 7-2 du Code Frontière Schengen, qui a permis d’instaurer un contrôle aux frontières extérieurs de l’Union Européenne pour ses ressortissants. C’est grâce à cette réforme également, que l’agence Frontex s’est vu dotée de moyens nouveaux et qu’elle agit désormais pour l’efficacité de ce contrôle.

François Fillon préconise la création de dix mille de postes de policiers. Comment croire sur ce sujet un candidat qui, lorsqu’il était Premier ministre, en a supprimé 13 000 dans les forces de sécurité intérieure, là où pendant ce quinquennat il en aura été créé 9000, dont une part importante dans les services de renseignement. Je veux également rappeler que 54 000 postes auront été supprimés dans les armées entre 2007 et 2012.  Comment conforter enfin les services publics de la sécurité et les armées lorsqu’on propose dans son programme présidentiel, la suppression de 500 000 fonctionnaires en cinq ans ?

Je m’adresse aujourd’hui aux français avec gravité et le seul souci de la vérité. En n’étant guidé que par le souci de la nécessaire unité du pays du pays face à une menace qui implique qu’on soit collectivement à la hauteur. Nous sommes à deux jours d’une échéance démocratique fondamentale pour notre pays. Je veux appeler ce jour, solennellement, une fois de plus, à la responsabilité.

J’appelle au refus des postures, de la facilité, de l’exclusion et de la haine. J’appelle à porter haut les valeurs de la république, à l’aimer, à la protéger, à s’en montrer digne.  J’appelle à respecter à chaque instant une exigence de vérité. Notre avenir ne peut pas être à l’image de celui que nous proposent les attiseurs de haine de Front national. Notre meilleure réponse, c’est de faire bloc, de rester unis, d’être toujours soudés, par-delà les opinions, les convictions et les choix politiques que nous pouvons faire en conscience.

Je vous remercie.
21.04.2017 Déclaration de M. Bernard CAZENEUVE, Premier ministre

Author: Redaction