COVID 19 et auteurs de violences intrafamiliales :

Le point sur les dispositifs exceptionnels de prise en charge des auteurs, par Isabelle Rome, haute fonctionnaire à l'égalité femmes/hommes.

Ainsi que l’a rappelé Nicole Belloubet, ministre de la justice, garde des Sceaux, le traitement judiciaire des violences intrafamiliales doit demeurer une priorité dans le contexte actuel d’état d’urgence sanitaire qui a nécessité la fermeture des tribunaux et la mise en place de plans de continuation d’activité.

La protection des victimes reste le premier mot d’ordre.

L’éviction du conjoint violent du domicile apparaît aujourd’hui, en cette période critique de confinement, comme une mesure essentielle à la protection de la victime ainsi qu’à celle des enfants, eux aussi atteints, en cas de violences conjugales.  Pouvant être prononcée à tous les stades de la procédure pénale, avant ou après jugement, y compris à titre d’alternative aux poursuites, cette mesure peut aussi émaner d’une ordonnance de protection, décision civile rendue par un juge aux affaires familiales. Comme l’énonce la loi du 28 décembre 2019, aucune plainte préalable n’est nécessaire à la saisine de ce juge qui statuera, le cas échéant, non seulement sur l’éloignement du conjoint violent en le soumettant notamment à une interdiction d’entrer en contact avec la victime, mais aussi sur l’organisation de la vie de la famille, en particulier la résidence des enfants.

Alors que les acteurs de l’hébergement sont lourdement sollicités en raison de la crise sanitaire -et ce, malgré les efforts importants déployés par le gouvernement- il était nécessaire de faciliter l’éviction du domicile des conjoints violents. C’est pourquoi le ministère de la justice et le secrétariat d’Etat à l’égalité femmes/hommes viennent de mettre en place un dispositif exceptionnel et temporaire permettant aux parquets de trouver, à cette fin, des solutions concrètes et immédiates.

Financée par le secrétariat d’Etat à l’égalité femmes/hommes, une plate-forme d’orientation consacrée à l’éviction du conjoint violent a ainsi été ouverte lundi 6 avril.

Gérée par le groupe SOS solidarités, elle peut être saisie par mail-eviction@groupe-sos.org- auquel il sera répondu sans délai :

  • Directement par l’officier de police judiciaire, si le procureur décide de ne pas engager de poursuite pénale mais néanmoins d’ordonner l’éviction du conjoint.

  • Par l’association ou le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) en charge des enquêtes sociales rapides, en cas de déférement au parquet, en vue d’un contrôle judiciaire comportant une éviction du domicile.

  • Ou par le juge aux affaires familiales ou son greffe, si l’éviction est prononcée dans le cadre d’une ordonnance de protection et que le défendeur indique ne pas disposer d’une solution d’hébergement en dehors du domicile conjugal.

Après avoir vérifié la disponibilité éventuelle d’hébergements auprès du secteur compétent (SIAO) et si aucune place ne peut y être trouvée, l’opérateur procédera à la recherche de nuitées hôtelières via une plate-forme hôtelière.

Dans un souci de protection des victimes, il en informera le SIAO afin de vérifier l’absence d’hébergement de femme victime dans le même lieu.

Cette orientation sera coordonnée avec les directrices régionales et les directeurs régionaux à l’égalité femmes/hommes, les associations spécialisées dans le suivi des personnes placées sous- main de justice et les professionnels du soin, en charge de celles-ci - Citoyens justice et la FNACAV. Ainsi donc le contrôle et le suivi du conjoint faisant l’objet de la mesure d’éviction seront immédiatement déclenchés.

Cliquer sur le lien pour accéder à la fiche de présentation du dispositif :

Le cas échéant, un téléphone grave danger pourra être attribué à la victime. 

L’ensemble des associations du réseau Citoyens justice se sont mobilisées afin de pouvoir effectuer un suivi téléphonique des personnes placées sous-main de justice, placées sous leur contrôle. Ce dernier sera d’autant plus renforcé qu’il aura été prononcé dans le cadre d’une mesure de contrôle judiciaire à caractère socio-éducatif.

Parce que la prise en charge de la violence est essentielle dans la prévention de la récidive, un suivi psychologique pourra être également assuré, en particulier par des professionnels affiliés à la Fédération Nationale des Associations et des Centres de prise en Charge d'Auteurs de Violences conjugales & Familiales (FNACAV).

La fin de la prise en charge lors de la sortie du confinement fera l’objet d’une attention particulière.

Le groupe SOS solidarités transmettra un tableau hebdomadaire au ministère de la justice et au secrétariat d’Etat à l’égalité femmes/hommes, permettant de suivre notamment le nombre des mesures d’éviction.

Par ailleurs, le Secrétariat d’Etat à l’égalité femmes/hommes a créé une ligne spéciale : le 08 019 019 11, ouverte du lundi au dimanche, de 9 h à 19 h, dont le but est de recevoir les appels d’hommes qui se sentent au bord du passage à l’acte. Ils seront écoutés par des intervenants de la FNACAV. L’objectif de ce dispositif est d’éviter à ces personnes de commettre de telles violences. Il est important qu’elles puissent être accompagnées, en cette période de confinement, susceptible de générer des tensions au sein de la famille, tout en suscitant aussi une grande anxiété.

La mise en place de ces dispositifs exceptionnels à l’égard des auteurs permet d’élargir le champ des possibles, en matière de protection des victimes et de prévention des violences intrafamiliales, dans le contexte actuel et très particulier de l’état d’urgence sanitaire.

Les associations spécialisées dans ces domaines ont fait également preuve de qualités d’adaptation exemplaires, et leurs personnels d’un grand dévouement, afin de pouvoir accueillir les victimes et les orienter, dans la configuration qui s’impose à toutes et à tous aujourd’hui.

La fédération nationale des CIDFF (centres d’information aux droits des femmes et des familles) a organisé un accueil, de manière spécifique, dans chaque département (liste disponible en cliquant sur ce lien). Il peut notamment être assuré de manière téléphonique, par voie dématérialisée, ou par visio-conférence.  

Lafédération nationale Solidarité femmes, qui gère la plate-forme 3919, a réorganisé les modalités de travail de ses écoutantes. Ce sont 4000 appels qui ont ainsi pu être reçus depuis le début du confinement, soit une moyenne hebdomadaire égale à celle atteinte immédiatement après la fin du Grenelle des violences conjugales.

Le réseau France Victimes, composé de 132 associations d’aide aux victimes, a pu prendre en charge, sur le plan local et depuis le début du confinement, plus de 3000 situations révélant des violences conjugales - que les faits soient antérieurs ou contemporains avec la période. Un accompagnement de 428 femmes bénéficiant d’un téléphone grave danger a été effectué par ces associations qui ont aussi procédé à 80 évaluations en vue de l’octroi de ce dispositif. 

Sur le plan national,  la  plateforme téléphonique 116006 accueille de nouveau en direct les appels : 

  • N° 116 006 (appel et services gratuits – anonyme et confidentiel - 7 jours sur 7 de 9h à 19h) et hors métropole +33 (0)1 80 50 33 76,

  • victimes@france-victimes.fr   pour faciliter la révélation des victimes qui ont des difficultés à parler.

  • Appel à l’aide par messages privés sur Facebook ou Twitter.

 

Relais de brève

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Author: Redaction