2017, réussir l’alternance

DSC02314Soyons sans illusion. Une éventuelle alternance en 2017 s’annonce extrêmement difficile, douloureuse, sinon empoisonnée. Penser le contraire est d’une naïveté insigne. Les innombrables candidats à l’élection présidentielle de 2017 devraient y réfléchir avant de fanfaronner et de se croire investis d’une mission providentielle. Les oppositions, radicalisées par l’échec, seront ivres de haine; la situation politique d’une majorité de « troisième force », entre socialistes et lepénistes, extrêmement inconfortable ; les médias, radios télévision, une partie de la presse, plongés dans une logique de harcèlement permanent; les syndicats sur un pied de guerre, prêts à en découdre et à bloquer le pays; la menace terroriste plus effroyable que jamais; la situation économique, sociale, financière, profondément dégradée avec ses gigantesques déficits, ses prélèvements obligatoires hallucinants, sa dette publique, et ses cinq millions de chômeurs; les obstacles juridiques et budgétaires à la réforme plus dirimants que jamais; le pays exsangue, démoralisé, déchiré, désespéré, désabusé. Comment gouverner dans ces conditions sans sombrer dès les premiers mois dans l’impopularité, le rejet chronique, une crise de confiance qui entraînerait la nouvelle équipe dans une spirale d’échec, d’impopularité vertigineuse, de paralysie totale? Le prochain quinquennat peut-il être pire que l’actuel? Je le crois profondément. Voici quelques recommandations pragmatiques liées au mode d’exercice du pouvoir qui peuvent contribuer à éviter une nouvelle catastrophe:

  1. La fin de l’hyper-présidence: le chef de l’Etat doit impérativement cesser de se donner en spectacle médiatique quotidien. Il n’est plus ressenti comme le « sauveur » mais comme le bouc émissaire national. A force de paraître, il incarne les soubresauts et malheurs de l’actualité et non plus la continuité de l’Etat. Il devient le coupable idéal de tous les maux de la création. Bien au contraire, le président de la République doit cultiver une autorité supérieure par le silence, la discrétion, la modestie, le mystère autour de sa personne. Il doit se montrer économe de ses paroles et apparitions, donner pendant cinq ans l’image du guide impartial, souverain, irréprochable sur le plan du comportement, en charge de l’avenir et de l’unité du pays. A la fois emblème et chef de la Nation, il lui faut impérativement protéger son prestige et sa dignité par une attitude empreinte de réserve, de volonté implacable et d’intelligence visionnaire. Il doit donner l’exemple du désintéressement personnel. Tout quinquennat est mort à partir du moment où un chef de l’Etat est soupçonné de préparer sa réélection.
  2. La politique des réalités: la vie politique se constitue de deux sphères  à la fois distinctes et complémentaires: la communication et l’action sur le réel. La première a pris ces dernières années une place démesurée au détriment de la seconde. Les polémiques, les fausses annonces, les coups médiatiques l’envahissent chaque jour un peu plus. La grande révolution à venir devrait être celle du retour au réel. Il faudra éviter tout psychodrame ou provocation inutile. Les querelles idéologiques, les batailles de principes doivent être bannies à jamais. Les ministres ont pour mission de diriger leur ministère et de conduire une politique, pas de gesticuler. Sous peine de limogeage immédiat, ils devront s’abstenir de s’exprimer publiquement sans l’accord préalable du Premier ministre et sur d’autres sujets que leur ministère. Tout manquement à la solidarité gouvernementale doit se traduire par une destitution sans délai.
  3. Le principe de responsabilité: le chef de gouvernement ou Premier ministre doit pour sa part incarner la responsabilité politique. Son rôle n’est pas celui d’un collaborateur du chef de l’Etat qui ne rêve que de lui succéder. Il est l’homme qui assume le risque de la décision. Sa présence à Matignon n’est pas un honneur ni une récompense ni un tremplin pour l’avenir. Il est en charge d’une mission précise qui lui est dévolue par le président de la République en accord avec la majorité à l’Assemblée nationale. Son bail doit être de deux ans. Pour apporter au pays les réformes et les transformations nécessaires au redressement du pays, dans un contexte aussi épouvantable, cette durée est le maximum qu’un être humain puisse supporter. Il ne doit jamais reculer ni renoncer. Il a une obligation de résultats, pas de moyens. En cas d’insuccès ou d’incapacité à faire passer les réformes pour lesquelles il est mandaté, sa responsabilité est engagée et son devoir immédiat est de démissionner, avec les honneurs de celui qui s’est battu pour son pays.
  4. Le  principe démocratique: la réussite de l’alternance passe avant tout par la résorption de la fracture démocratique. 88% des Français ont une mauvaise image de la politique (cevipof 2016). Le taux d’abstention et le vote extrémiste battent des records. Il est impératif de combattre cette cassure entre le peuple et les élites politiques. Un gouvernement a besoin du soutien populaire pour faire passer ses réformes et ses projets. Ce n’est pas le bavardage et les gesticulations intempestives qui peuvent le lui assurer, mais des gages concrets de respect. Le recours au référendum doit intervenir pour les décisions cruciales touchant à l’avenir de la Nation et bien entendu, son verdict respecté à n’importe quel prix. La représentation parlementaire doit être renouvelée en permanence, un brassage constant des élites politiques est indispensable; les perdants aux élections législatives doivent revenir à leur métier d’origine. Il faut combattre le cumul excessif des mandats, y compris dans le temps, mettre fin à l’image détestable d’une caste politique étanche et rivée à ses intérêts de carrière, redécouvrir le sens profond du mandat législatif comme mode de représentation de la Nation. De nouvelles couches de populations, venus de tous les horizons professionnels – pas seulement la fonction publique – doivent être mis en position d’accéder aux mandats parlementaires.

 

Voilà, mais en achevant ces quelques lignes, une impression contrastée et contradictoire me vient à l’esprit: relèvent-elle du bon sens le plus élémentaire ou de l’utopie délirante dans le contexte présent?

Maxime TANDONNET

 

 

 


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Author: Redaction